Qu'on se le dise ! Ici, il fut un temps, c'était un village de bouchonniers. Il s'agit d'une inscription sur le mur de l'église du petit village de Llauro dans le Pyrénées-Orientales (66).
En effet, Llauro, à présent village très tranquille de 320 habitants, a été il y a quelques dizaines d'années l'un des grands centres français de l'industrie du bouchon de liège. Le territoire de la commune, qui s'étend sur 8km2, fait partie de la vallée des Aspres, très boisée, couverte de maquis et de chênes-lièges.
L'écorce du chêne-liège est l'une des
productions végétales les plus
étonnantes de nos climats. Apparente dès
l'âge de 3 à 4 ans, elle est formée de
couches annuelles distinctes (elles révèlent
l'âge précis du liège) qui, en
s'ajoutant les une aux autres, peuvent recouvrir le tronc et
les branches maîtresses sur 20 à 30 cm
d'épaisseur quand l'arbre n'est pas soumis à
des exploitations périodiques. [...] Le liège est la partie
morte de l'écorce que l'on détache en
préservant la couche vivante (appelée mère)(1).
L'exploitation du liège se divise en plusieurs étapes :
Sources :
(1) Site de Jean Tosti : http://jeantosti.com/musee/liege/liege.htm
L'exploitation du liège se divise en plusieurs étapes :
- le semis du chêne-liège ou la greffe de chêne vert.
- le démasclage, c'est à dire une première levée de liège lorsque l'arbre a 20 ans. Le liège mâle prélevé sera sans utilité pour la fabrication des bouchons, car irrégulier et peu élastique. Il pourra être utilisé pour les isolants, les bouées, les semelles de chaussures...
- la formation du nouveau liège : sur la mère, se développe une nouvelle couche de liège femelle.
- la levée du liège : elle se fait tous les 12 à 15 ans, entre le 15 juin et le 15 août.
On raconte que le premier bouchon de liège a été utilisé par Dom
Pérignon, vers 1700, suite à une visite en Roussillon sur la route de Saint Jacques de Compostelle, pendant laquelle
il avait vu les moines utiliser le liège pour fermer leurs gourdes.
L'exploitation débute dans les années 1800. Son expansion est la conséquence des ravages du phylloxéra sur les vignobles alentours. En 1827, on comptabilise 218 hectares de chênes-lièges, soit plus de 26% du territoire de Llauro.
L'exploitation débute dans les années 1800. Son expansion est la conséquence des ravages du phylloxéra sur les vignobles alentours. En 1827, on comptabilise 218 hectares de chênes-lièges, soit plus de 26% du territoire de Llauro.
Dès 1825, des bouchonniers espagnols viennent travailler à Llauro. Trente ans plus tard, on dénombre 12 bouchonniers à Llauro, 6 à Fourques et 1 à Trouillas. En 1876, on dénombre cette fois 20 bouchonniers à Llauro et 12 à Fourques. Dans l'Almanach Le Roussillonais de 1895, les ressources du village sont "Vins, céréales, liège. Nombreuses fabriques de bouchons."
Les salaires des bouchonniers étaient plus élevés que ceux des ouvriers agricoles. 14 francs par jour en 1925 pour un homme, 7 francs pour une femme pour des travaux différents (trier les bouchons, coudre les sacs, faire les bouchons à la main). Les hommes taillaient le liège en bandes et coupaient les carrés de liège. Les enfants travaillaient à partir de 12 ans.
Quelques noms d'usines de bouchons de Llauro en 1927 : Planes Martin, Larrat et Cie, Manent-Paraire, Giseprt Michel, Sabiol J., Planes Jacques, Dabouzi, Cabanat M;, Coste Abdon, Barnèdes Firmin, Rigau M., Béringué Alphonse, Prats M.
Le village comptait également, un boulanger, un boucher, deux cafés, deux coiffeurs, un cordonnier, quatre épiciers, deux laitiers et un méarchéal ferrant.
Après une forte progression, l'industrie du bouchon n'existera plus à Llauro. Le dernier bouchonnier, Yves Gispert, est mort en 1982 et
personne ne l'a remplacé (1). La concurrence déjà présente de l'Espagne, mais surtout le dépérissement de la foret dû à de nombreux incendies, à la dégradation du sol, et au morcellement des propriétés, l'arrivée massive des bouchons en plastique et enfin la situation géographique de Llauro, loin des grands axes et du chemin de fer.
Grâce à son cadre de vie agréable, le nombre d'habitants qui avait diminué jusqu'à 181 habitants en 1954, a remonté jusqu'à celui de l'ère de l'exploitation du chêne-liège.
Grâce à son cadre de vie agréable, le nombre d'habitants qui avait diminué jusqu'à 181 habitants en 1954, a remonté jusqu'à celui de l'ère de l'exploitation du chêne-liège.
Llauro - vue actuelle - Jean Tosti |
Sources :
(1) Site de Jean Tosti : http://jeantosti.com/musee/liege/liege.htm
Jean Rifa, l'histoire de nos villages tome 3
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